« Le mégaphone de Dieu » (St. Luc: jeudi, le 08 mars, 2018; Jérémie 7, 23-28; Ps. 94; St. Luc 11, 14-23)
Un prédicateur apprécié. Il y a deux semaines de cela (le 21 fév. 2018),
Billy Graham, le célèbre prédicateur américain,
est décédé à l’âge de 99 ans. Pendant sa
carrière d’évangéliste qui a duré presque 60 ans, le Rév. Graham a pu proclamer
le message de Jésus – en personne – à 210
millions de personnes dans au-delà de 185 pays différents. Personne d’autre dans l’histoire du Christianisme
n’a pu communiquer l’évangile à tant de personnes que lui. On dit qu’au-delà de 3,2 millions de personnes ont vécu une conversion lors de ses « croisades »
d’évangélisation. De nombreuses vedettes
et personnalités médiatiques lui ont fait des éloges, et avec raison. C’est bien
de souligner les efforts « herculéens » d’un homme de Dieu. Il reste que dans le cas du prophète Jérémie, les choses se sont passées
autrement. Alors que Billy Graham
cherchait, avec l’aide de la radio et de la télévision, d’atteindre le plus
grand nombre de gens possible avec l’évangile, Jérémie, pour sa part, a dû se composer
avec un auditoire qui refusait de l’écouter.
À la fin de la vie de Jérémie, on ne
pouvait pas parler des foules de personnes qui avaient répondu favorablement à
son message; au contraire, tout ce qu’on pouvait dire en tant qu’hommage à
Jérémie était qu’il avait obéi à ce que
Dieu lui avait dit.
Un prophète méprisé. Dans notre première lecture, on voit les
obstacles que Jérémie a dû affronter. En
fait, tout allait bien pour Jérémie jusqu’au
moment où Dieu a commencé à lui parler. Jérémie était un jeune prêtre, un membre
junior d’une famille de sacrificateurs (Jér. 1, 1). Et là, Yahvé lui dit que même avant que
Jérémie vienne au monde, il avait prévu une autre vocation pour lui :
« Avant même de te
façonner dans le sein de ta mère, je te connaissais ; avant que tu viennes au
jour, je t’ai consacré ; je fais de toi
un prophète pour les nations. » (Jér. 1, 5)
Comme la
plupart des prophètes, Jérémie n’est pas trop enthousiasmé avec l’idée d’être
le porte-parole de Yahvé :
« Et je dis : « Ah !
Seigneur mon Dieu ! Vois donc : je ne
sais pas parler, je suis un enfant ! » (1, 6)
Comme d’habitude,
Yahvé n’accepte pas d’excuses :
« Ne dis pas : “Je suis
un enfant !” Tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai ; tout ce que je
t’ordonnerai, tu le diras… Puis le Seigneur étendit la main et me toucha la
bouche. Il me dit : « Voici, je mets dans
ta bouche mes paroles ! » (1, 7.9)
Enfant rebelle, épouse
infidèle. Mais Hélas!
– ce n’étaient pas des paroles agréables que Jérémie devait prononcer au peuple
– c’était plutôt des paroles de jugement.
À l’époque de Jérémie, ça faisait 15
siècles depuis que Dieu aie appelé Abraham
à quitter son pays et à devenir le « père » d’une nouvelle nation, le
peuple de Dieu. Plus tard, à l’époque de
Moïse, Yahvé avait sauvé son peuple
de l’esclavage en Égypte, lui a conduit à travers le désert et lui a installé au
Canaan, la Terre Promise. Il reste que
la plupart de temps, ce n’allait pas bien
entre Yahvé et son peuple. Dans les
livres prophétiques de la Bible, il y a deux
images qui nous sont proposées pour illustrer la nature de la relation entre Yahvé et Israël – tout d’abord, celle d’un père et son
enfant rebelle, et en second lieu, celle
d’un mari en chicane avec son épouse. Les
membres du peuple de Dieu – souvent à la suite de leurs dirigeants – se rebellaient
constamment contre les termes de l’alliance que Yahvé avait conclu avec Israël,
c.-à-d. la loi de Moïse. Les Israélites avaient tendance à adorer les
divinités des nations environnantes. Les
prophètes décrivent l’idolâtrie comme étant l’adultère
spirituel – le peuple de Dieu trompait Yahvé avec d’autres dieux. Voilà, vous
qui êtes parents et/ou des gens mariés, vous avez une grande facilité à
comprendre le dynamique qui existait (et qui existe) entre Dieu et son peuple.
Chacun
d’entre nous qui a déjà vu son enfant « se péter le nez » après d’avoir
refusé d’écouter un conseil ou bien chaque
couple qui a déjà passé par des moments difficiles sait c’est quoi d’aimer quelqu’un qui résiste au message qu’on
tente de lui communiquer. Vous savez
qu’est-ce que c’est de vouloir le bien de l’autre, et de vivre la peine de voir
l’autre faire les choses à sa tête et ensuite, subir les conséquences.
Le moment de vérité. Finalement, le moment de jugement est arrivé – et c’est Jérémie qui devait l’annoncer
au peuple. L’armée babylonienne était à
la porte de Jérusalem et la ville – incluant le Temple de Yahvé – sera bientôt détruite,
et le peuple sera exilé au Babylone. À
toutes fins pratiques, c’était la fin de l’alliance entre Yahvé et Israël; le projet du Créateur de sauver le monde
par l’entremise de la nation d’Israël avait
échoué. C’était la fin. Ce n’est pas pour rien qu’on appelle Jérémie « le
prophète pleurant ». En envoyant tant
de prophètes vers son peuple, Yahvé avait tenté de capter son attention, mais sans succès. Le peuple avait endurci son cœur, ils avaient « raidi
leur nuque ». D’autres prophètes – contemporains
de Jérémie – parlaient d’un espoir qui sera révélé pour le peuple une fois que
l’exil sera terminé, mais au moment du désastre, c’était difficile d’envisager
un avenir pour le peuple de Dieu. Il
reste que quelques décennies plus tard, une petite minorité parmi les exilés
sont revenus à Jérusalem pour rebâtir, en ayant tirée bien des leçons de leur expérience
d’exil. En ramenant un reste de son
peuple dans son pays, Yahvé s’est montré –
encore une fois – le sauveur d’Israël.
Dieu parle encore. Il reste que Dieu continue à parler à son
peuple, à son Église. Dieu nous parle dans les Écritures, dans la
liturgie, à travers la nature, à travers les gens, à travers les circonstances.
Dieu nous parle même au travers de nos peines. Dans son livre intitulé Le problème de la Souffrance, C.S. Lewis a dit: « Dieu murmure à
notre oreille dans nos plaisirs, il parle à notre conscience, mais il crie au travers de nos souffrances:
c’est son mégaphone pour réveiller un monde sourd. » La souffrance nous met en contact avec la réalité qui est exprimée dans les
paroles du Psaume d’aujourd’hui :
« …prosternez-vous, adorons
le Seigneur qui nous a faits. Oui, il
est notre Dieu ; nous sommes le peuple
qu’il conduit » (Ps. 94, 6-7).
Voilà notre identité
fondamentale - nous sommes des créatures.
Nous ne sommes pas auto-suffisants. Nous dépendons du Créateur et nous devons tout
à Dieu. Cette affirmation est aux
antipodes de la mentalité typiquement « moderne », exprimée dans un
poème du 19e siècle : « Je suis le maître de mon destin, Le
capitaine de mon âme ». Les
Écritures sont claires – notre bonheur
se trouve en Dieu, et non dans une autonomie narcissique. Pour vivre à la lumière de cette vérité, ça nous
prend de la foi, de la confiance. Jésus
a prétendu être « le pain de vie » et prétendait pouvoir nous donner « l’eau
vive » de son Esprit (voir Jn. 4,
10; 6, 35; 7, 37-39). Jésus veut nous combler. Corrie Ten Boom, une hollandaise qui a abritée
des Juifs dans sa maison lors de l’occupation nazi, et qui a survécu aux camps
de concentration, a dit : « Vous ne saurez jamais que Jésus est tout ce dont vous avez besoin
tant qu’Il ne sera pas tout ce que vous avez ». Mettons-nous à l’écoute de la bonne
nouvelle. Rappelons-nous que Jésus est
présent dans nos vies et qu’il nous promet la liberté et le véritable bonheur. Amen.
Comments
Post a Comment