« Où est le Dieu de la justice? » (St. Luc: jeudi, le 12 octobre, 2017; Malachie 3.13-20; Psaume 1)



Il y a juste des solutions.  Les spécialistes du « marketing » sont doués pour nous offrir des solutions « magiques » à nos problèmes.  Vous avez des rides sur votre visage?  Pas de problème; cette crème va les faire disparaître!  Vous avez de la misère à vous stationner en parallèle?  Pas de trouble; voilà une voiture qui se stationne elle-même!  Il suffit de peser sur le piton, de lâcher le volant, et voilà!  Il y a juste des solutions…
Une formule gagnante.  À prime abord, le Psaume d’aujourd’hui peut sembler être une tentative de nous « vendre » le bonheur.  La formule est simple : garde la loi de Dieu et tout ira bien pour toi.  L’homme « juste » aura que du succès – « tout ce qu’il entreprend réussira ».  En effet, lorsqu’on fait la lecture du livre de Deutéronome, c’est bien ça l’impression qu’on peut avoir.  Il y a des bénédictions qui découlent de l’obéissance à la loi de Dieu; il y a également des malédictions qui résultent de l’infidélité à l’alliance établie par Yahvé entre lui et son peuple.  En Dt. 30.19-20, Yahvé s’adresse à son peuple d’une manière directe :

« je vous offre le choix entre la vie et la mort, entre la bénédiction et la malédiction. Choisissez donc la vie, afin que vous viviez …Choisissez d’aimer l’Éternel, de lui obéir …car c’est lui qui vous fait vivre et qui pourra vous accorder de passer de nombreux jours dans le pays que l’Éternel a promis …de donner à vos ancêtres Abraham, Isaac et Jacob ».

Jusqu’à-là, la formule nous paraît être assez simple – les « justes » jouiront des bénédictions alors que les « méchants » vont subir la malédiction.  Et pourtant, qu’est-ce qu’on voit dans la première lecture?
Une dispute conjugale.  Les membres du peuple de Dieu se disent : « À quoi bon garder la loi de Dieu?  Même les méchants sont prospères! »  Où est le Dieu de l’alliance?  Où est le Dieu de la justice (2.17)?  Le peuple s’écrit : « Là, c’est injuste!  On a tout fait pour être fidèle à Yahvé, et qu’est-ce qui nous arrive?  Malheur par-dessus malheur! »  En réalité, le livre de Malachie se lit comme le procès-verbal d’une dispute conjugale (ou bien, un plaidoyer dans une cour civile).  Dans les Écritures, Yahvé est souvent présenté comme étant « l’époux » de son peuple, Israël (ex : Mal. 2.11-16; És. 54.6-8).  Et, il faut le dire, comme c’est le cas pour beaucoup de couples, Yahvé et Israël étaient souvent en chicane.  Ceci ne devrait pas trop nous surprendre; après tout, Yahvé est un Dieu « personnel »; c.-à-d. il est un Dieu qui entre en relation avec son peuple, qui chemine avec Israël, qui fait équipe avec elle.  Comme dans toute relation, il y a des moments de tension, de profond désaccord, de conflit.  Les promesses de l’alliance ont fait en sorte que Yahvé et Israël avaient des attentes l’un à l’égard de l’autre.  Tantôt, c’est le peuple qui se plaint à Yahvé, tantôt c’est Yahvé qui rabroue son peuple.  Pour que la relation fonctionne bien, les deux parties doivent faire preuve de fidélité.  Le livre de Malachie commence avec un petit échange, en fait, il s’agit du premier dans une série de 8 échanges entre Yahvé et son « épouse » (1.2, 6, 7; 2.13-14, 17; 3.6-7, 8, 13-14) :

« Moi, je vous ai aimés, déclare l’Éternel.
Et vous me demandez: «En quoi donc nous as-tu aimés?»  (1.2).

Dans notre première lecture, on retrouve le 8e échange entre Yahvé et Israël :

« Vos propos contre moi sont durs, dit l’Éternel,
et vous, vous demandez: «Quels propos avons-nous proférés contre toi?»  Eh bien, vous avez dit: «Il est bien inutile de servir Dieu » (3.13-14).

En fait, chacun des 8 échanges qu’on retrouve dans le livre de Malachie se déroule de la même manière – Yahvé affirme quelque chose; ensuite, son peuple lui réplique pour lui dire « Comment ça?  Expliques-toi.  Ce n’est pas vrai ce que tu dis. »  Les deux s’accusent mutuellement d’infidélité.  C’est bien ça, n’est-ce pas, le ton qui prend souvent un arguent entre deux personnes qui sont en relation, qui se sont engagées l’une envers l’autre?
Le juste qui souffre.  Israël réclame bien des choses : « Servir Dieu n’a pas de sens » (3.14).  « Où est le Dieu de la justice? » (2.17).  Où sont les bénédictions promises?  Yahvé, démontre ta fidélité!  Fais-nous justice!  Récompense-nous!  Pourquoi les justes souffrent-ils alors que ceux qui font le mal échappent à la justice?  Yahvé, il faut tu fasses de quoi!  Il te faut être juste!  Israël joue le rôle de la victime qui souffre injustement, bien que la nation n’est pas si innocente que ça…  Il reste que les Écritures contiennent bien des exemples des gens de bien qui ont souffert injustement.  Le cas par excellence s’agit bel et bien de Job, cet homme « intègre et droit …qui craignait Dieu et qui évitait de faire le mal » (Job 1.1).  Malgré sa « justice », Job a tout perdu – ses biens, ses enfants, même sa santé.  Quand ses trois amis viennent lui rendre visite, ils appliquent, on pourra dire, l’enseignement du Psaume 1 à ce que vit Job.  Ils lui disent : « Examine-toi pour voir si tu as fait quelque chose de pas correct.  C’est évident que si tu souffres ainsi, c’est parce que tu as commis un péché quelconque ».  En fait, le livre de Job s’agit d’une réflexion sur la question de pourquoi les justes souffrent.  Finalement, aucune réponse « facile » est offerte à la question.  Non, la Bible ne nous donne aucune explication abstraite au sujet du « Pourquoi la souffrance ».
Dieu sur le banc des accusés.  L’histoire suivante est racontée au sujet du grand Jour de Jugement (voir Mal. 3.17-20).  Toute l’humanité est rassemblée devant le trône de Dieu.  Mais là, c’est bien les nations du monde qui réclament la justice d’auprès du Créateur.  Comment ça se fait que tu as permis qu’il y ait tellement de souffrance et d’injustice dans le monde tout au long de l’histoire humaine?  Comment ça se fait que tu as pu être sadique à ce point-là?  Les nations se consultèrent pour voir quelle punition sera adéquate pour punir un tel crime.  Finalement, l’humanité est arrivée à une décision : Dieu méritait qu’on lui crucifie!  La foule immense de la race humaine s’est mise à hurler : crucifie-le!  Qu’il paie pour sa cruauté!  Mais soudainement, un grand silence a commencé à se faire sentir alors qu’on constatait que Dieu avait déjà purgé sa peine… La « réponse » donné par les Écritures au dilemme de la souffrance est que Dieu est venu partager nos souffrances dans la personne de Jésus.

Sois fidèle, sois patient.  Alors que Yahvé répond à Israël dans le livre de Malachie, il demande à son peuple d’attendre le Jour de jugement.  Il promet à son peuple qu’il verra « qu’il y a une différence entre les justes et les méchants, et entre celui qui sert Dieu et celui qui ne le sert pas. Car voici: le jour vient, ardent comme un brasier, où tous …ceux qui font le mal seront de la paille » (3.18-19).  Dieu rassure son peuple que la justice va se faire, lors du grand Jour de Yahvé.  À ce moment-là, tous les comptes seront réglés.  L’image de la paille nous ramène au Psaume 1.  « Les méchants sont pareils à la paille éparpillée par le vent » alors que l’homme juste est « comme un arbre implanté près d’un cours d’eau; il donne toujours son fruit... » (1.3-4).  Le contraste est claire – le méchant subit la mort (dans tous les sens du mot) alors que le juste jouit de la vie (dans tous les sens du terme).  Dieu dit à son peuple de tenir bon – le Jour du Seigneur ne sera pas seulement un moment de jugement, mais aussi un moment de guérison.  Amen.

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