Revue de livre: Chaque Dépression a un Sens


     La dépression peut-elle se guérir en prenant une pilule?  Le journaliste britannique Johann Hari discute des « causes méconnues » et les « soins novateurs » de la dépression dans son livre Chaque Dépression a un Sens, paru en 2018.  Hari décrit sa propre expérience de se faire prescrire des antidépresseurs alors qu’il était adolescent.  Malgré qu’il ait passé 13 ans à prendre la dose maximale des antidépresseurs chimiques, Hari a continué d’être hanté par la dépression.  Afin de bien comprendre ce qu’il vivait, Hari a entrepris de parcourir le monde en faisant un voyage de 65,000 kilomètres pour interviewer les principaux scientifiques et chercheurs en santé mentale. Le résultat de son enquête était la publication de son deuxième « bestseller » (New York Times).

     Hari remet en question la croyance populaire qui veut que la dépression soit fondamentalement un problème au sein du système nerveux central (cerveau).  Lorsque Hari s’est plaint de sa dépression auprès de son médecin, on lui a expliqué qu’il souffrait d’un manque de sérotonine et que les bons médicaments régleront le problème et lui redonneront un sentiment de bien-être.  Le fait qu’il continuait à être déprimé – tout en prenant des antidépresseurs – lors des 13 prochaines années a conduit Hari à questionner ce diagnostic.  Selon l’hypothèse de Hari, la dépression ne s’agit pas d’abord d’un problématique dans le cerveau mais plutôt dans la vie des gens qui se sentent déprimés.  Hari a identifié sept causes de la dépression qui résultent du fait que nous nous sommes déconnectés des choses essentielles desquelles dépendent notre bonheur.  Au lieu de concevoir la dépression comme étant une autre maladie qu’on devrait soigner avec des médicaments, Hari nous invite à comprendre la dépression comme étant le résultat du fait que nos besoins primordiaux n’ont pas été comblés.  C.-à-d. notre besoin d’être « connecté » à d’autres, de donner un sens à notre vie, d’avoir une raison-d’être et de l’espoir pour l’avenir.  En améliorant les facteurs de notre environnement social, nous affirme Hari, nous pourrons vaincre la dépression. 

     Les arguments mis de l’avant par Hari au sujet des causes de la dépression et les solutions qui s’offrent à nous peuvent nous paraître comme étant simplement le gros bon sens.  Pourquoi personne d’autre ne nous a dit tout ça il y a longtemps?  En fait, nombreux sont les psychiatres et chercheurs partout dans le monde qui ont soulevés des sérieuses questions sur comment la communauté médicale pose des diagnostics de dépression et propose de la soigner, mais ceux qui représentent l’« orthodoxie » en ce qui a trait à la maladie mentale leur ont grandement ignoré.  L’histoire que la communauté médicale nous conte (et qui a fait $100 milliards en profits pour les compagnies pharmaceutiques) veut nous faire croire que les gens déprimés souffrent d’un dysfonctionnement dans leur cerveau qu’on doit soigner avec les médicaments appropriés.  Hari nous propose une histoire différente selon laquelle les gens déprimés ne sont pas « brisés » ou déficients; ils s’agissent plutôt des gens qui souffrent dû aux circonstances pénibles de la vie.   Hari souligne le fait que les « symptômes » qu’on trouve chez une personne endeuillée ressemblent étrangement à ceux d’une personne déprimée.  La « Bible » de la psychiatrie américaine, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (« DSM Ve édition »), affirme que c’est tout à fait acceptable pour un individu qui vient de perdre un être cher de vivre les symptômes de la dépression sur une période de deux semaines, suit à laquelle la personne peut recevoir un diagnostic d’une maladie mentale!

     À l’appui de sa théorie que les causes de la dépression se trouvent, non pas dans le cerveau, mais plutôt dans la société, Hari cite l’organisation mondiale de la santé (2011) : « La santé mentale se produit socialement : la présence ou l’absence de la santé mentale est d’abord et avant tout un indicateur social et donc requière des solutions sociales, et non seulement individuelles ».  Hari cite aussi la déclaration de l’ONU pour la Journée mondiale de la santé (2017) : « le récit biomédical prédominant de la dépression est basé sur une utilisation des résultats de la recherche qui sont biaisés et sélectifs et qui causent plus de tort que de bien…ils doivent être laissés de côté…nous devons cesser de se servir des médicaments afin de s’adresser aux questions qui sont intiment reliées aux problématiques sociales ».  Hari insiste que la dépression s’agît d’un signal – un signal qui nous dit qu’il y a des choses dans ta vie qui ne marchent pas; donc, tu as besoin de faire des changements positifs afin de t’assurer que tes besoins seront comblés.

     Je vous recommande fortement la lecture de cet ouvrage.  Dans le dernier chapitre de son livre, Hari (que se dit athée), propose que nous ne nous souffrions pas tant d’un déséquilibre chimique qu’un déséquilibre social et spirituel dans notre manière de vivre.  Hari souligne le fait que depuis longtemps, nous nous sommes déconnectés les uns des autres et des choses essentielles dans la vie.  Nous n’acceptons plus l’idée qu’il y a quelque chose de plus grand que l’individu et son acquisition de davantage de choses matérielles.  Peut-être nous arriverons à créer des nouvelles formes de communauté centrées sur des meilleurs histoires, au sujet de la dépression ainsi qu’au sujet de toutes choses.  Peut-être nous pourrons apprendre comment prendre soins les uns des autres, au lieu de devoir se rendre – tout seul – chez le médecin.  Peut-être notre communauté pourra pouvoir un contexte dans lequel nous pouvons vivre la souffrance d’une manière plus humaine, en faisant notre deuil en étant entourés des gens qui se préoccupent de nous au lieu de prendre des pilules – seul – pour faire en sorte qu’on ne ressent plus notre douleur.  Si vous ne cherchez rien de moins qu’une vie remplie de sens, je vous invite à lire Chaque Dépression a un Sens.

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